« Je pars à la retraite avec le regret de n’avoir pas pu amener SUTEELEC et SYLISO à la fusion »

« Je pars à la retraite avec le regret de n’avoir pas pu amener SUTEELEC et SYLISO à la fusion »

I N T E R V I E W    E X C L U S I V E

PREMIER SECRÉTAIRE AUX REVENDICATIONS ET AUX CONFLITS DU SUTEELEC, CHEICK TIDJANI TRAORE :

« Je pars à la retraite avec le regret de n’avoir pas pu amener SUTEELEC et SYLISO à la fusion »

Né dans la capitale des rails, Cheick Tidjani TRAORE a été recruté en janvier 1986 en qualité de plombier à l’EDM-SA. A la faveur de la réforme institutionnelle des secteurs de l’électricité et de l’eau potable, il est transféré à la SOMAGEP-SA. Il a fait valoir ses droits à la retraite, le 31 décembre 2019, après 33 ans de service. Chef de Service entretien des Centres de l’Intérieur, dernier poste occupé, il avait auparavant occupé les postes de Chef de Division maintenance des installations hydrauliques de la station de pompage de Bamako, de 2002 à 2008. A cette date, il a été nommé Chef de Division Maintenance des Centres de l’Intérieur. Syndicaliste engagé, Cheick Tidjani Traoré est le premier secrétaire aux revendications et aux conflits du Syndicat Unique des Travailleurs de l’Eau et de l’Electricité (SUTEELEC). Lequel le désignait pour le représenter au Conseil de discipline où il défendait les agents mis en cause. Ce rôle de défenseur, comme un avocat des travailleurs, l’homme le prenait au sérieux quitte à frustrer, le plus souvent, les autres membres du Conseil. Fier de porter le surnom Me Jacques Vergès, célèbre avocat qui a défendu, entre autres personnalités célèbres, l’ancien président du Mali, le Général Moussa Traoré, Cheick Tidjani Traoré, se confie au Filet d’O. Dans cette interview que nous vous invitons à lire entre les lignes, il parle de sa carrière purement technique mais aussi syndicale. Ainsi, a-t-il déclaré : « je pars à la retraite avec le regret de n’avoir pas pu amener SUTEELEC et SYLISO à la fusion ».

Qu’est-ce qui vous a marqué durant votre parcours professionnel ?

C’est mon parcours de plombier dans lequel j’ai eu tous les honneurs professionnels, notamment les remerciements et félicitations venant de mes responsables hiérarchiques. J’en suis énormément fier même si j’ai un diplôme d’hydraulicien.

Quelle est l’expérience que vous voulez partager avec vos cadets ?

C’était à mes débuts. Un moment où je n’accordais pas, par ignorance, d’importance à l’organigramme. Autrement dit, le sens de la responsabilité. L’histoire que je raconte s’est déroulée lors d’un lavage du réservoir de Missira. J’étais le chef d’équipe de l’entretien quand bien même mes collaborateurs, tous quasiment, avaient des diplômes d’étude supérieurs au mien.

L’infrastructure tournait normalement sous le contrôle de l’agent de quart qui recevait de moi les ordres. Cependant à mon insu, l’agent de quart a appliqué les consignes données par un autre agent dont, nous (agent de quart et moi) croyions être un responsable supérieur.

Conséquence : on a assisté à la noyade des pompes un peu plus tard. Alerté par les bruits changeant des pompes, j’ai vérifié et découvert la catastrophe. Par la suite, l’agent de quart m’a informé qu’il avait changé le protocole à la demande du fameux responsable supérieur. L’incident a eu un impact négatif sur l’alimentation en eau potable de l’hôpital de Point G. Ce qui a été lourd de conséquence pour moi. C’est ce jour que j’ai reçu ma première demande d’explication malgré mon insistance à clamer mon innocence. On m’a fait comprendre que ma responsabilité était engagée en tant que chef d’équipe. Ainsi, il aurait fallu cet incident pour que je commence à comprendre le fonctionnement administratif des structures. En outre, ce fut pour moi un déclic pour virer dans les activités syndicales.

Filet d’O : Durant votre parcours quel est le moment qui vous a marqué le plus ?

CTT : Je peux dire que c’est quand j’étais plombier à la station jusqu’à être chef de

Section. Je reste nostalgique de l’atmosphère bon enfant de cette époque, qui était marquée par la cohésion sociale, l’entente, la solidarité et l’esprit de famille qui régnaient entre les travailleurs qui marchaient tous, la main dans la main.

Quel est votre plus grand regret ?

Mon plus grand regret est de n’avoir pas pu amener les deux syndicats SYLISO et SUTEELEC à la fusion. C’était mon souhait le plus ardent. Par ailleurs, j’ai traversé des moments difficiles dans lesquels certains de mes responsables supérieurs n’ont pas hésité à me jouer des coups bas. Aujourd’hui, j’ai rangé ces choses dans l’armoire du passé. C’était des étapes de la vie qu’il fallait vivre et continuer son petit bonhomme de chemin.

Quel est votre message à la jeune génération ?

Je demande à mes jeunes cadets de travailler bien et de se former. La collaboration professionnelle n’est pas facile. Elle peut connaître des hauts et des bas. En plus du respect que tu dois à ton responsable, s’il se rend compte de ta compétence professionnelle, il te respectera. Je le disais plus haut, j’ai connu des moments de tension avec certains de mes chefs de service et des directeurs. Malgré tout, ils m’ont respecté parce qu’ils savaient et appréciaient mes capacités professionnelles à sa juste valeur. Je suis fier également d’avoir entretenu de bonnes relations professionnelles. Pour preuve, le Directeur Général, Boubacar Kane et son adjoint, Boubacar Idrissa Maïga, ont été mes stagiaires pendant 6 mois. Jusqu’aujourd’hui, le DGA m’appelle « mon premier chef ». C’est un honneur pour moi. Tout cela prouve que le travail bien fait paye toujours, qu’on le veuille ou pas. C’est pour toutes ces raisons que j’ai dit, plus haut, que je ne pouvais pas énumérer mes exploits. Ils sont énormes. C’est ce qui a poussé mon chef à me demander de faire l’hydraulique. Nous, on n’étudiait pas pour la valeur du diplôme. Mais plutôt pour la connaissance. De toute façon, nos diplômes n’étaient pas homologués directement.

Quel est votre dernier mot ?

Je demande aux jeunes débutants d’aller doucement et d’éviter de forcer les choses. Il y aura des retombés même si ce n’est pas immédiat. A chaque fois qu’on touche un mot qui ressemble un peu à ce que tu as fait comme cachotterie, tu commences à t’inquiéter et tu ne seras jamais tranquille. Tout le monde n’est pas destiné à avoir des voitures, des maisons … Quand on force, on s’expose aux dangers. Enfin, je lance un appel pressant aux uns et aux autres à l’entente. Car, c’est un élément indispensable dans le développement d’une entreprise.